Trois questions à Guillaume Vidil, Directeur général de Marfret

A 37 ans, Guillaume Vidil, directeur général de Fluviofeeder Armement, prend la direction générale de Marfret.

La réorganisation juridique de la compagnie s’est achevée en mai 2018, date de l’assemblée générale de Marfret, devenue SAS à Conseil de surveillance. Marseille Fret en est le président et Guillaume Vidil le directeur général.

Vous dirigez Marfret depuis mai 2018. Avez-vous été préparé depuis votre enfance à succéder à vos grand-père, père et oncle ?

Plus jeune, je rêvais de devenir océanographe et de parcourir le monde à la découverte des océans. En filigrane, j’avais la pression de mon grand-père pour reprendre un jour les rênes de la compagnie. A l’époque des années lycée, je déjeunais avec lui tous les mardis et systématiquement il me demandait quand j’allais reprendre la compagnie ! C’était une boutade entre nous. Une fois le bac en poche, j’ai réussi le concours de l’Ecole Nationale de la Marine Marchande. Mon premier embarquement en tant qu’élève officier pont et machine s’est déroulé à bord d’un navire de recherche océanographique de Genavir.

J’ai rejoint ensuite Marseille Fret comme lieutenant, second capitaine, second mécanicien sur des porte-conteneurs. Au terme de deux années de navigation, les nouvelles constructions de Marfret nécessitaient un suivi aux Chantiers navals d’Ulsan, en Corée. J’ai participé à la livraison des Marfret Guyane et Marajo et à leur première traversée pour finalement poser sac à terre en 2009 à l’issue du baptême du Marfret Marajo. Lors de mon année de césure j’ai beaucoup voyagé. C’est à ce moment-là que s’est opérée la prise de conscience, l’envie de rejoindre l’entreprise familiale. Je devais m’en donner les moyens, gravir tous les échelons pour finalement devenir légitime et ne pas être considéré comme « le fils de ».

Comment a évolué votre carrière chez Marfret ?

 Elle a débuté à terre dans le transport fluvial, comme superintendant de la filiale Fluviofeeder Armement (FFA). Depuis Genevilliers, j’avais en charge la maintenance technique de la flotte de péniches porte-conteneurs. Ce fut la découverte de l’univers de la batellerie. En 2011, je suis devenu chef d’agence et, un an plus tard, j’exerçais les fonctions de directeur de Fluviofeeder Armement. En 2015, j’ai conservé mes fonctions de directeur général de FFA tout en devenant chef de la ligne Méditerranée Caraïbes.

Mon cursus technique s’est étoffé d’une formation en management. Au sein de l’IAE, j’ai découvert le marketing, la comptabilité, les fournisseurs et les clients ! Je fais partie de l’Association pour le Progrès du Management (APM), un club qui fédère des chefs d’entreprises. Mais je considère que ma formation n’est pas terminée.

Quelle est votre vision d’avenir du groupe Marfret ?

Organiser le développement du groupe tout en le diversifiant. Nous sommes à la fois armateur, commissionnaire en transports, manutentionnaire, agent maritime. Depuis plusieurs mois maintenant, Marfret propose des prestations de logistique et d’entreposage. Nous venons de vivre un cycle marqué par d’importantes opérations de concentration dans le transport maritime et par l’arrivé des méga porte-conteneurs. De nombreuses compagnies de taille moyenne ont disparu. Raymond et Bernard Vidil forment un duo fantastique. Ils ont su ensemble résister, défendre nos positions. Je prends mes nouvelles fonctions dans une période où Marfret envisage un redéploiement aussi bien géographique qu’une diversification vers de nouveaux métiers. Je crois fermement à la capacité d’innovation de nos équipes tout en restant fidèle à l’ADN de la compagnie à savoir la proximité, l’écoute et la disponibilité vis-à-vis de notre clientèle.

Global Sulfur Cap, l’heure des choix

Global Sulfur Cap, l’heure des choix

 Au 1er janvier 2020, les navires de commerce devront réduire leurs émissions de soufre dans l’atmosphère de 3,5% à 0,5%. Armateurs et majors du pétrole naviguent à vue pour répondre aux défis technologique et économiques lancés par l’Organisation maritime mondiale (OMI).

Face aux incertitudes sur les quantités disponibles et sur le prix du HFO à basse teneur en soufre, les compagnies sont à la croisée des chemins. Elles devront dès juillet 2019 faire des choix qui les engageront définitivement et durablement vers de nouvelles routes. Qu’il s’agisse de propulsion au gasoil, au GNL, de l’ajout de scrubbers, une chose semble certaine : Ces nouvelles réglementations vont renchérir de manière substantielle le coût du transport maritime. Au delà de l’impact sur les lignes, les industriels eux-mêmes risquent d’en pâtir. Sous couvert d’environnement, c’est le principe même de l’économie mondialisée que les industriels devront repenser.

Le compte à rebours est lancé. A onze mois d’une échéance capitale pour l’industrie du transport maritime, l’heure des choix approche à grand pas. Pour respecter des règles imposées à marche forcée, les armateurs naviguent dans une brume épaisse. Ils doivent répondre coûte que coûte au défi de 0,5 % de soufre rejeté dans l’atmosphère programmé au 1er janvier 2020. Aucune obligation n’a été délivrée par l’Organisation Maritime Internationale aux groupes pétroliers de produire du low sulphur en quantité suffisante ni de qualité acceptable. Qui plus est, les états signataires ne se sentent pas responsables du résultat. Que vont devenir les quantités du fuel HFO à un taux de 3,5% produites en abondance par les raffineries et dont personne ne veut ? Demain, seront-ils en mesure de compenser avec du Marine Gas Oil (MGO) qui semblerait devenir le combustible prépondérant ?

Une situation préoccupante. Schématiquement, les armateurs ont trois possibilités pour être en conformité : continuer à consommer du fuel à 3,5% en équipant les navires de laveur de fumées (scrubbers). La deuxième option consiste à changer de carburant et s’avitailler soit en combustible à 0,5 % soit passer au gasoil. Enfin, dernière solution radicale, le changement de technologie avec des navires au GNL, hydrogène ou hybrides.

A ce jour, sur les 55 000 navires de commerce en circulation, seuls quelques-uns ont investi. Onze mois pour convertir la flotte mondiale ne semble guère réaliste. Rien à ce stade ne peut plus changer la donne.

L’équation à résoudre comporte deux inconnues : les prix et la disponibilité de chaque carburant.

Révision des chartes-parties

Depuis plusieurs mois, les services techniques de Marfret se préparent à cette échéance. « Au premier trimestre 2019, nous allons choisir le combustible en fonction des zones de navigation et des disponibilité produits. De février à septembre, nous préparerons la flotte, adapterons si nécessaire le circuit combustible du navire en fonction des spécificités du produit et rédigerons les procédures bunker. Au 1er octobre au plus tard, nous commencerons le soutage avec du fuel à 0,5% ou du MGO, après avoir rincé les citernes », explique le capitaine d’armement Charles Gauthier. Pour être en conformité nous devrons nous assurer d’avoir brûlé la totalité du HFO à 3,5%. « La situation diffère si le navire est affrété (Nasp, MedCar)», complète Charles Gauthier.

S’agissant de l’affrètement, les nouvelles règles OMI supposent une révision de la charte-partie et une redéfinition de la stratégie du broker. Doit-il rechercher des navires équipés de scrubber ou qui seront exposés à consommer le combustible disponible, selon les cas du gasoil ou du fuel à 0,5% ?

Les opérateurs devront faire preuve de vigilance quant à la qualité du produit disponible. Faute de cadre précis, deux types de fuel HFO à 0,5% seront sur le marché. Le premier, produit par les raffineries qui auront fait en temps voulu l’investissement d’1 milliard de $, donnera satisfaction et le second, plus instable car issu de mélanges avec des gasoils, risque d’endommager les moteurs.

Ces choix influeront sur les équilibres financiers de la ligne. Le poste combustible représente tout de même 60% du coût d’exploitation d’un navire. Actuellement, une seule journée de navigation d’un porte-conteneurs de grande capacité coûte 80 000 dollars… Qu’en sera-t-il demain ? La directive soufre va faire flamber le prix du transport maritime de marchandises qui concentre 90% du commerce mondial. Les nouvelles BAF (Bunker Adjustement Factor) en préparation, que les chargeurs cherchent à discréditer, risquent de modifier durablement les équilibres.

Beaucoup de services risquent de disparaître et de nombreux navires partiront à la casse. Les industriels qui produisent aujourd’hui en Chine vont sans doute repenser leur organisation et relocaliser.

L’industrie maritime qui ne représente à ce jour que 2 à 3% des émissions mondiales de CO2 risque de faire, au prix fort, les frais de la transition énergétique.

Coup d’envoi de la campagne du melon du Costa Rica

Brésil et Costa Rica sont les principaux pays exportateurs de melons et pastèque en Amérique du sud et centrale. Au terme de huit mois d’expédition en sortie de Natal vers Algésiras, sur la ligne Guyane, Marfret assure la continuité des approvisionnements vers l’Europe grâce au service Medcar. Janvier signe en effet le coup d’envoi de la récolte de melons et pastèques cultivés au Costa Rica et exportés depuis le port de Moin. Jusqu’à fin avril 2019, les fruits seront cueillis, triés, stockés et transportés dans des conteneurs reefers vers les bassins de consommation.

Au Costa Rica, la campagne de cueillette des melons Cantaloup et pastèques bat son plein de janvier à avril. Chaque année, Marfret achemine ces fruits sur la ligne hebdomadaire Méditerranée Caraïbes (MedCar) qui dessert l’Espagne. En hiver, quand les productions cessent en Europe, la douceur du climat d’Amérique centrale et du sud permet d’approvisionner l’Europe, principal débouché des melons costaricains avec les États-Unis.

L’activité s’intensifie en sortie de Moin, principale port d’expédition des melons et pastèques. « Cette campagne coïncide avec les vacances de Pâques en Espagne où la grande distribution se sert des fruits exotiques comme produits d’appel. Les melons sont expédiés en Italie et en Espagne à une période où ces pays n’ont plus de production locale », explique Céline Douvenou, responsable commerciale reefer de la ligne Medcar de Marfret.

Technicité et repositionnement des vides

Juste avant que ne commencent les livraisons, la compagnie maritime est dans les starting-blocks. Aux avant-postes, l’équipe MedCar a préalablement œuvré au pré-positionnement des conteneurs 40 pieds reefers afin de fluidifier les opérations de logistique export. Car expédier des melons cantaloup et des pastèques suppose une mécanique bien huilée. « La chaîne logistique doit être maîtrisée car il s’agit de fruits fragiles. Notre terminal étant directement situé sur les quais du port de Moin, nous contribuons à la fluidité lors du passage à quai de la marchandise. Nous avons permis aux exportateurs de rendre visite à notre gestionnaire de dépôts afin d’améliorer leurs connaissances techniques et de leur permettre de paramétrer plus facilement les conteneurs une fois arrivés dans les fincas », détaille Céline Douvenou. Les transporteurs routiers arrivent dans les exploitations, avec posés sur leurs châssis, les conteneurs autorisant un empotage directement en sortie de l’entrepôt à 7°.

Costa Rica et Brésil exportent les melons vers l’Italie

Jusque-là dominé par le Mexique, le marché en sortie d’Amérique centrale doit désormais composer avec le Costa Rica dont la richesse des terres est propice à la culture de ces deux fruits. Connu pour la culture du sorho, du riz, du maïs et du café, le Costa Rica a fait son entrée sur le marché des melons et des pastèques, cultivés à Nandayure, un canton réputé pour la fertilité de ses sols.

La croissance est telle que les deux fruits concentrent à eux seul 10% des exportations du pays. Les volumes de melon en provenance d’Amérique centrale ont crû de manière importante.

Une diversification réussie également pour le Brésil, qui complète ses productions de mangues et ananas. Le melon cantaloup est cultivé dans la région de Mossoro, à 180 Km de Natal, contrairement aux mangues qui obligent les transporteurs à parcourir plus de 1 000 Km pour rejoindre les « fazendas » de Petrolina.

« Pour Marfret, les melons brésiliens représentent 45% des expéditions, devant les mangues (28%) et bananes (22%).  En 2018, la production est restée stable mais nos volumes transportés ont augmenté de 8%», commente Patrice Le Bras, responsable commercial de la ligne Amérique du Sud. Une ligne qui en sortie de Natal et Fortaleza dessert l’Europe via les ports d’Algesiras et de Rotterdam. Quant à la ligne MedCar, qui touche Gênes et Livourne, elle alimente les grossistes italiens. Sur les étals des marchés italiens se côtoient des fruits et légumes d’origines diverses parmi lesquels melons et pastèques du Costa Rica.